Le Grafie, trait d’union entre acheteurs et SIAE

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Diverses par leur statut et leurs activités, les structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) restent souvent mal connues des acheteurs publics. En région Ile-de-France, le GRAFIE, fédération de réseaux de SIAE, aide à la fois les donneurs d’ordres à sourcer les candidats potentiels et les prestataires à améliorer leurs réponses aux appels d’offres.

53,7 millions d’euros en 2012. 88,4 millions quatre ans plus tard. C’est le chiffre d’affaires généré par les marchés publics dans le secteur des SIAE en région Ile-de-France. Selon les données de la DIRECCTE, 190 structures ont décroché au moins un contrat public  en 2016. En dépit de cette progression, il reste bien du chemin à parcourir puisque l’on compte près de 400 SIAE sur le territoire francilien (un annuaire est disponible en ligne, voir le lien en bas de page). De surcroît, l’accès à la commande publique fluctue en fonction de la raison sociale : mise à disposition de personnel ou production de biens et de services. Dans la première catégorie, toutes les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) et 81% des associations intermédiaires (AI) ont obtenu au moins un marché en 2016. Pour ce qui est de la seconde catégorie, seules 56% des entreprises d’insertion (EI) ont fait de même. Les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) sont les plus mal lotis avec seulement 18%. Les différences de publics à insérer et de secteurs d’activité peuvent expliquer ces écarts. Les bâtiments et les travaux publics, qui représentent la moitié du montant financier des contrats obtenus par des SIAE, génèrent 82% du CA public des ETTI et 31% de celui des AI. A contrario, les espaces verts, qui pèsent 48% du CA des chantiers d’insertion, ne constituent que 6% du montant total des marchés attribués à des SIAE. De nombreux acheteurs restent à convaincre. Les communes et intercommunalités sont à l’origine de 27% des contrats attribués, contre 4% pour le conseil régional ou 7% pour l’Etat.

Dans ce type de marché, le point crucial, c’est le risque d’infructueux. On joue un peu à quitte ou double. S’il n’y a pas d’offres, on aura des retours du type : vous voyez, vous n’êtes pas capable de répondre

C’est pourquoi le Groupement régional des acteurs franciliens de l’insertion par l’économique (GRAFIE) qui regroupe sous une même bannière six réseaux (ARDIE , fédération francilienne des associations intermédiaires ; Chantier école IDF ; Comité national de liaison des régies de quartiers CNLRQ ; Coorace IDF, fédération régionale de l’économie sociale et solidaire ; Fédération des acteurs de la solidarité, FAS IDF ; Fédération des entreprises d’insertion IDF) a décidé, il y a deux ans, de créer un poste de chargé de mission achat responsable, confié à  Joffrey Hacquin. Le contexte était aussi porteur avec la montée en puissance du Grand Paris et un potentiel énorme de marchés réservés et clausés. Car les clauses sociales (ex articles 14, 30 et 53 du Code) sont à l’origine de 86% des contrats obtenus par des SIAE. Le travail de Joffrey Hacquin comporte plusieurs facettes. D’abord faire connaître le GRAFIE, faire comprendre ce qu’il est et à quoi il sert, par exemple lors des manifestations organisées par la mission d’appui au développement des clauses sociales (MACS). Ensuite mettre en relation les acheteurs publics avec le monde de l’IAE, en leur prouvant que les structures d’insertion proposent des services de qualité.  « Le secteur emploie bien sûr des personnes avec des profils différents, mais ce sont des structures qui fournissent une prestation professionnelle. Dans ce type de marché, le point crucial, c’est le risque d’infructueux. On joue un peu à quitte ou double. S’il n’y a pas d’offres, on aura des retours du type : vous voyez, vous n’êtes pas capable de répondre. Et l’acheteur hésitera à renouveler l’expérience », analyse Joffrey Hacquin.

Faciliter le sourcing et la réponse aux appels d’offres


Pour éviter ce type de situation, le chargé de mission aide gratuitement les pouvoirs adjudicateurs à effectuer leur sourcing. « Je leur demande de me fournir un maximum d’informations sur leur besoin et je sollicite nos réseaux : est-ce que parmi vos adhérents, quelqu’un est capable de prendre en charge ? » Il illustre son propos avec le cas de l’élagage.

C’est bien d’inciter les acheteurs à se tourner vers l’IAE, mais si les structures ne sont pas au rendez-vous, cela ne sert à rien

« Nous avons seulement quelques structures capables d’intervenir parce que ce travail nécessite une formation et une habilitation particulières. Et au-dessus de trois mètres de haut, on ne sait pas faire. Il faut donc allotir. » Afin de persuader les acheteurs publics, il valorise les réussites. Comme ce marché de la RATP qui consistait à coller de nouvelles affichettes dans les rames du RER A pour prévenir de la fermeture de stations en raison de travaux estivaux.  La prestation comportait  plusieurs contraintes : des lieux différents d’intervention, une cadence de deux trains par jour,  un planning à respecter et une pose nécessitant de la précision (les plans à installer comportaient des perforations correspondant ghacquin2.jpgaux signaux lumineux des stations). « On leur a proposé deux structures par site. Le marché a été un succès et la RATP veut reconduire l’expérience pour le métro », assure Joffrey Hacquin (photo ci-contre). S’il sensibilise les pouvoirs adjudicateurs, le chargé de mission de GRAFIE mobilise aussi les opérateurs. « C’est bien d’inciter les acheteurs à se tourner vers l’IAE, mais si les structures ne sont pas au rendez-vous, cela ne sert à rien ». Par exemple en leur donnant un coup de main pour améliorer les réponses aux appels d’offres. «  Il existe une grande disparité. Mais c’est le reflet des entreprises de manière générale, certaines sont ultra calées en marché public et d’autres viennent de loin. L’idée c’est de mettre à niveau toutes les structures, de les rendre autonomes. L’autre enjeu, c’est de les pousser à se grouper. Et aussi leur donner des réflexes commerciaux, comme par exemple appeler le client régulièrement pour s’enquérir de sa satisfaction. Certains le font, mais ce n’est pas évident pour tout le monde. » Joffrey Hacquin attend beaucoup de la réforme des textes (l’article 36 de l’ordonnance marchés permet désormais de réserver des lots soit à des entreprises adaptées, soit à des SIAE, sans mettre en concurrence ces deux secteurs). « Les chiffres de la DIRECCTE datent d’avant le changement de réglementation. On aura les chiffres 2017 à la fin de l’année et j’ai hâte de les découvrir. »