Candidature écartée : le juge contrôle l’erreur manifeste d’appréciation de la CAO

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Dans une décision du 23 janvier, le Conseil d’Etat a sanctionné une collectivité qui avait écarté une candidature au motif que l’entreprise ne présentait pas, selon elle, toutes les qualifications et références nécessaires. La CAO avait justifié sa décision par l'absence de la qualification « Travaux publics 5500 » alors même que l'entreprise avait fourni de nombreuses références et certificats de capacité pour des prestations analogues.

D’un point de vue sémantique, les qualifications professionnelles se distinguent des références. Mais lorsque « la preuve de qualification peut être rapportée par tout moyen, notamment des certificats d’identité professionnelle ou des références », comme l’indiquait le règlement de consultation du marché de travaux lancé par la commune de Six-Fours-Les-Plages (Var), les différences sont moins claires. En tous cas, les sages du Palais-Royal y ont vu là un moyen de retenir la candidature de la société SGCAA pour le marché relatif à la création d’un réseau d’assainissement fluvial lancé en 2003 (1). Or la CAO avait écarté cette entreprise car elle avait considéré ses qualifications et références insuffisantes. La société SGCAA ne détenait pas la qualification « Travaux publics 5500 » exigée par le règlement de la consultation et ne justifiait pas non plus d’une équivalence qui aurait pu être acceptée au regard de ce même RC. Mais, a relevé la haute juridiction administrative, « elle a fourni de nombreuses références de travaux exécutés ou en cours et des certificats de capacité attestant de la réalisation de prestations analogues aux travaux, objet du marché, consistant en des travaux d’assainissement, de terrassement, de réfection de sols, dont certains pour le compte de la commune elle-même ou d’autres collectivités locales, et de sa compétence pour exécuter les travaux... »

Qualification suffisante

L’entreprise justifiait bien de capacités pour répondre aux besoins du marché. La CAO s’était, elle, fondée uniquement sur le fait que le candidat ne détenait pas la fameuse qualification « Travaux publics 5500 » pour écarter la candidature. Ce faisant, elle « a entaché sa décision du 14 octobre 2003 d’une erreur manifeste d’appréciation » pour le Conseil d’Etat qui a donc débouté la commune de sa requête en annulation de sa condamnation prononcée par le TA de Nice. Le juge suprême a aussi annulé l’arrêt de la CAA de Marseille qui était pourtant arrivée à la même conclusion. La cour avait en effet « jugé que cette société justifiait d’une qualification suffisante », mais « sans limiter son contrôle de l’appréciation portée par la commission d’appel d’offres à la recherche d’une erreur manifeste », commettant ainsi une erreur de droit. Le Conseil d’Etat a choisi de suivre les conclusions de son rapporteur public Nicolas Boulouis relatives à l’affaire (2) et a précisé sa jurisprudence. « Le juge de l’excès de pouvoir ne peut censurer l’appréciation par l’autorité administrative, en application de cet article [52 du CMP de l’époque], sur les garanties et capacités techniques et financières que présentent les candidats à un marché public, ainsi que sur leurs références professionnelles, que dans le cas où cette appréciation est entachée d’une erreur manifeste ». En l’espèce, l’erreur de la CAO était trop évidente pour ne pas la sanctionner.

(1) CE 23 janvier 2012, Commune de Six-Fours-Les-Plages, n° 346970, CE 23 janvier 2012 Six Fours