Edito 587

  • 22/04/2016
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J’ai les mirettes rouges comme les yeux d’un lapin mixomatosé, à force de décrypter les 152 752 881 406 fichiers que le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) m’a transmis. Primo, leur dossier, nom de code « Panamapa Papers », quoique zipé, a planté ma bécane pendant deux jours.  Je vois encore mon disque dur flapi tel un gisant du radeau de la méduse, impossible à ranimer. Deuzio, même si ce fatras a été envoyé à 289 rédactions dans 112 pays, il a fallu que je me débrouille tout seul pour extirper de cette masse cyclopéenne des révélations croustillantes sur les pratiques de l’achat public hexagonal et la refonte de la réglementation, parce que d’après mon contact, il paraît que ça n’intéresse guère que moi. A l’instar du vicomte de Lesseps, j’ai donc creusé. Faute de percer des secrets ou des isthmes, j’ai dégoté quelques infos. En attendant de se présenter aux primaires, notre ministre de l’Economie, au firmament des sondages, a confirmé la prochaine naissance d’un code de la commande publique et s’est déclaré fervent partisan de la démat, dernier pan, selon lui, de la réforme (lire notre article). Entre nous, ça ne se voit pas trop dans le décret du 25 mars. Le MPS, par exemple, n’a pas été rendu obligatoire, alors qu’il est pourtant plébiscité par les fédérations du BTP (lire notre article). Je suis ensuite tombé sur un texte de l’avocate Virginie Delannoy sur l’arrêté du 29 mars concernant les renseignements demandés aux candidats (lire notre invité du jeudi). Mon attention a été surtout attirée par un texte mystérieux intitulé « si je t’aime, prends Gard à toi ». Une vraie pépite puisque j’ai découvert l’existence du service « outils et ressources » de la direction commande publique de ce département, à l’origine de la création de 23 outils pratiques, dont un vade-mecum de la réception des travaux (lire notre article). J’ai aussi appris que le ministère de la Défense allait commencer à déployer un SI achat dans trois entités pilotes dès la rentrée prochaine (lire notre article), mais je n’ai pas réussi à trouver, dans les documents hackés, ce qu’en pensait la DAE qui veut aussi développer un outil de ce type. Je suis enfin tombé sur le dossier de mon patron. Rien sur ses innombrables placements dans des zones franches reculées du Haut-Doubs, juste une annotation en marge de son dossier de candidature au club des amateurs de vin fin : « réputé pour préférer le champomy au mauvais champagne ». Bon allez, il est temps de mettre un terme à cet édito proprement scandaleux qui vogue sous pavillon de complaisance. En plus, il doit certainement y avoir un bon film sur canal. A la semaine prochaine, peut-être.

Jean-Marc Binot