Edito 611

  • 04/11/2016
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Hier, comme tous les ans, j’ai participé, avec d’autres compères épicuriens, aux agapes liminaires à la remise des prix des romans noirs de la commande publique. Bon, j’en conviens, l’endroit était un bistrot sans prétention de la rive droite, à des années lumière des grandes tables où les jurés du Gonaudot ou du Renoncourt salivent comme des mâtins de Naples, rien qu’en parcourant le menu préparé à leur intention par un grand toqué. Chauffés à blanc par un picrate ulcérant, certainement coupé avec de la sciure de pied de vigne, et cousin pas si éloigné du pinard distribué aux poilus dans les tranchées avant la grande zigouille, nous n’avons pas longtemps tergiversé avant de désigner les lauréats, destinés à devenir célèbres dans tout le Landerneau des marchés publics, de la mairie de Pichade-sur-Mer à l’hôpital de Clamesset, en passant par la région de Septicémie Septentrionale. Le prix  « Touchez pas au grisbi  » a été rapidement attribué au livre « Petits marchés entre amis », avant même qu’on ait eu le temps d’attaquer les poireaux herculéens servis en entrée. Il faut dire que l’histoire de ces trois marchés attribués par un édile à des entreprises dirigées par son neveu et son adjoint est écrite de façon hyperréaliste (lire notre article). Avec ses soupçons de collusion et ses rebondissements au pénal, le PPP de Soissons a été désigné, sans grande surprise oserai-je dire, meilleur « polar glauque »  (lire notre article), tandis que la ville Royan a été désignée, là aussi à l’unanimité,  « best enquête of ze year » avec son avis de publicité-sourcing pour mieux connaître l’état du marché fournisseurs (lire notre article). Entre la poire et le fromage, un prix spécial du « thriller contentieux » a été attribué ex-aequo à un recours Tropic contre la DSP d’un crématorium municipal, proprement réduit en cendres, bien que l’auteur ait mis le paquet, arguant de l’absence de publication au JOUE de saisine  et du comité technique, ou encore du non-respect du délai de validité des offres… (lire notre article), et à un litige tragique, au cours duquel une collectivité a, un peu négligemment, communiqué l’intégralité de l’offre du requérant dans son mémoire de défense (lire notre invité du jeudi). Bon allez, je vous laisse car j’ai vraiment du mal à digérer les crêpes suzette servies au dessert, bien qu’on soit encore loin de la Chandeleur, aurait signalé Raymond. A la semaine prochaine, peut-être.

Jean-Marc Binot