Une méthode de notation adaptée à un accord-cadre non alloti

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A l’occasion d’un contrat-cadre non alloti, le Conseil de l’UE avait imposé aux candidats de déposer une proposition financière pour chaque prestation de service qui était notée et pondérée séparément. Le Tribunal de l’Union européenne (UE) a admis la méthode de notation dans laquelle le candidat évincé a obtenu une note inférieure à celle de l’attributaire dont le prix total était plus élevé. Il n'y avait pas obligation de comparer les offres sur la base des prix calculés globalement.

Le Conseil de l’Union européenne (UE) a élaboré une méthode de notation du critère prix en vue de tenir compte des spécificités du marché public, à savoir un contrat-cadre (équivalent de l’accord-cadre) non alloti comportant une pluralité de prestations, afin de l’attribuer au candidat ayant remis l’offre économiquement la plus avantageuse. Le procédé a été contesté par une société évincée. Elle a introduit un recours devant le Tribunal de l’UE, huit jours après la signature du contrat, soit le 23 février 2017. Selon la requérante, elle aurait obtenu un score inférieur à celui de l’attributaire alors que le prix total de celui-ci était plus élevé. En l’espèce, la  prestation concernait des services en matière de cybersécurité, regroupés en paquets dont leurs natures n’ont pas été dévoilées par la décision de justice pour des raisons de confidentialité. A noter d’une part que la mise en concurrence était soumise aux règles du titre V Partie I du règlement européen n°966/2012 du 25 octobre 2012. D’autre part, à la lecture de l’arrêt, l’absence d’allotissement serait justifiée dans le cadre de cette affaire.

Méthode de notation pour noter le prix de chaque paquet de service 


S’agissant de l’évaluation des offres, la valeur technique représentait 60% de la note et le prix 40%. Les candidats devaient remettre une proposition financière distincte par paquet. Il ressort de l’arrêt qu’« une note financière était calculée pour chaque paquet de services en comparant le prix calculé pour un sous-critère d’une offre donnée avec la somme de toutes les offres reçues pour ce sous-critère […]. Un pourcentage de pondération était ensuite appliqué à chaque paquet de services et, enfin, une note financière était attribuée pour chaque offre financière, correspondant à la somme pondérée des notes assignées pour chacun des critères financiers ». La juridiction a commencé par rappeler le large pouvoir reconnu à l’acheteur dans le choix et la mise en œuvre des critères d’attribution, sous réserve « de correspondre à la nature, à l’objet et aux spécificités dudit marché et servir au mieux les besoins visés et les objectifs poursuivis par [celui-ci] ». Quant à l’office du juge, il est limité « à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi que de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir », a souligné le Tribunal.

Pas d’obligation de comparer les offres sur la base des prix calculés de façon globale


D’après la requérante, le processus adopté, découlant de cette volonté de noter séparément le coût des prestations demandées, aurait pour effet de ne pas refléter la réelle différence entre les prix totaux proposés. Autrement dit, l’analyse aurait dû être effectuée de manière globale puisque l’opération n’a pas été divisée en lots. Les juges n’ont cependant pas suivi le raisonnement de la société. Primo, la démarche aurait été justifiée par rapport à l’objet du marché public ; il ne s’agirait pas d’une scission artificielle du marché. De surcroit, cette approche aurait permis au Conseil de veiller à la bonne dotation des ressources des candidats pour chaque paquet. Deuzio, « le fait que ces paquets de services relèvent du même prestataire et soient liés entre eux n’implique pas nécessairement que la comparaison des offres doive être réalisée sur la base des prix calculés de façon globale », affirment les magistrats. Enfin, « l’approche par paquets de services n’est pas erronée, poursuivent ces derniers. Il s’ensuit que l’évaluation financière ne repose pas sur une évaluation des offres du point du vue du coût total […]. [L’argument de la requérante] se fonde sur la prémisse erronée que les prix proposés pour chaque paquet de services étaient additionnés et que l’appréciation de l’offre s’effectuait globalement au regard du prix total, alors que tel n’est pas le cas ». La formule de chaque paquet doit permettre de donner la meilleure note financière à l’offre la moins chère. L’objectif annoncé par le Conseil était d’encourager les candidats à remettre une proposition optimale sur tous les points.   

L’OAB, une solution pour se prémunir des montages financiers douteux des candidats


Toutefois, n’est-il pas opportun pour un opérateur de sous-facturer les services dont la pondération de la note est élevé et de surfacturer ceux de moindre valeur ? Le Conseil de l’UE a trouvé la parade face à un tel scénario : écarter la proposition douteuse au motif qu’elle serait une offre anormalement basse. La solution a été admise par le Tribunal : « Une telle hypothèse postule un comportement illégal de la part du soumissionnaire, dont l’offre serait nécessairement rejetée ». Au passage, il précise qu’« un tel exemple ne démontre donc aucunement que la formule mathématique prévue inciterait en elle-même à se comporter illégalement ». En conclusion, le juge européen n’a pas fait droit aux prétentions de la société d’annuler la décision d’attribution du contrat-cadre.